Chapitre 22 - Baiser ou se faire baiser, il faut choisir (partie 1)

Bo lui offrit un large sourire.

— Non c'est celui de la bière !

Ses cousins seraient trop jaloux de la voir manipuler le liquide ambré comme ça.

— Tu ferais fortune dans un pub, s'amusa-t-il. Comment tu fais ça ?

Il se rendit compte que sa curiosité si spontanée pouvait sembler étrange chez un sorcier comme Olivier.

— C'est un type de magie que je n'ai jamais étudié, tempéra-t-il.

— J'en sais trop rien... Je ressens l'eau en moi... Comme une prolongation de moi. Plus avec la mer d'ailleurs que l'eau du robinet... Mais la bière c'est assez familier aussi, avoua-t-elle en riant.

Ils entendirent un nouveau boum contre le mur.
Cette fois Steven avait plaqué Dimitri contre la porte de la salle de bain. Ses lèvres s'étaient faites exigeantes alors que Dimitri ne portait plus que son jean. Il ouvrit la porte de la salle de bain et le relâcha pour aller ouvrir l'eau de la douche.
Il revint vers lui pour le pousser contre la porte qu'il avait tiré cette fois pour la fermer mais au lieu de l'embrasser plaça sa main sur la bouche de l'anglais. Il sentait que s'il avait encore sa langue dans la sienne, il allait perdre le fil. Il approcha ses lèvres de son oreille et lui murmura.

— Je voudrais qu'on parle un peu tous les deux... Maintenant qu'Olivier pense que je suis entrain de m'occuper de toi en lui laissant le champ libre avec ta frangine.

Dimitri n'avait pas été en reste pour répondre aux baisers de Steven. Après toutes les merdes qu'il avait traversées dernièrement, il estimait cette récréation plus que bienvenue, surtout qu'il s'agissait de Steven et pas d'un inconnu.
Il fronça les sourcils, contrarié qu'il l'empêche de repartir à l'assaut de sa bouche alors qu'ils étaient si bien partis. Ce qu'il lui dit à l'oreille eut le mérite de l'arrêter alors qu'il avait les mains sur la ceinture de Steven.
Il ôta sa main de sa bouche et chercha sa peau sous sa chemise. Dimitri voulait bien parler, mais il voulait tout de même continuer à en profiter, surtout qu'il devinait que ça risquait de ne pas être une discussion très plaisante.

— De quoi tu veux qu'on cause ? murmura-t-il à son oreille à son tour.

— Olivier a changé ces dernières semaines. Assez pour que je me méfie alors que c'est mon chef.

Il avait murmuré ça en embrassant son cou. Avec l'eau, même s'il y avait un micro, on ne les entendrait pas.

— Je ne sais pas en qui vous pouvez avoir confiance à DLS.

Il revint l'embrasser avec dureté alors que ses mains parcouraient sa peau fiévreusement.

Putain. Steven lui balançait ça tout en le chauffant, c'était un coup que son cerveau déconnecte pour que celui du bas prenne le pas et qu'il oublie ce qu'il venait de dire.
Dimitri répondit encore une fois à son baiser avec plus d'empressement tout en cherchant à nouveau la ceinture de Steven. Finalement, il rompit le baiser au prétexte de lui enlever sa chemise et commença à parcourir son torse de baisers avides.

— J'ai confiance en personne, murmura-t-il en remontant jusqu'à sa clavicule.

Il avait eu une relative confiance en Joanna et elle leur avait planté un couteau dans le dos. Il savait que Quentin avait un autre pote à la direction, un mec que Bo avait rencontré une ou deux fois, mais il était peut-être tout aussi louche que la blonde.

— Et t'as raison.

Steven sentit qu'il serait incapable de pousser plus loin son avertissement. Il acheva de les déshabiller et l'entraina sous la douche. Il retrouva avec une aisance déconcertante les caresses et le rythme que Dimitri avait pu aimer. Il aimait autant le sentir en lui que l'inverse tout en sachant qu'il ne tiendrait pas plus longtemps que lui vu comment l'excitation était montée entre eux.
Il resta un moment à retrouver son souffle contre lui, l'eau chaude coulant sur leur corps.

— Je sais pas ce que vous foutez dans ce merdier... Et après tout ce temps, je te demande pas de me faire confiance non plus, murmura-t-il.

Il ne doutait pas un instant qu'Olivier se servait de lui et ça ne lui plaisait pas. Mais il travaillait ici depuis des années. Alors il n'avait pas été embauché pour eux, c'était ce qui le soulageait.

Dimitri avait glissé ses doigts dans ses cheveux. De son autre main, il caressait lentement le dos de Steven, ses doigts suivant sa colonne vertébrale.
Cette étreinte lui avait fait un bien fou. Elle était même bien plus satisfaisante que n'importe laquelle de ses parties de jambes en l'air depuis des mois. Peut-être parce qu'il se retrouvait en terrain connu tout en redécouvrant Steven après tout ce temps.

— Il en faut plus que ça de toute façon.

Ce n'était pas parce qu'il avait pris son pied qu'il lui faisait confiance. Ce n'était tout simplement pas possible après tout ce qui leur était arrivé. D'ailleurs, cela faisait un trop long moment qu'il avait laissé Bo seule avec le voleur d'orgasmes.
Il regarda Steven dans les yeux.

— Je peux au moins te dire ça : Bo est en danger. ça fait 3 fois qu'on tente de la tuer en un mois. T'as forcément entendu parler d'Eric de Lyonesse et de sa mort, non ?

Dimitri ne s'avançait guère avec ces informations que n'importe qui à DLS aurait certainement pu entendre.

— Bien sûr. Je veille sur la sécurité d'Olivier pour pas qu'il finisse pareille. On est 4 à veiller sur lui à tour de rôle... Il m'a rappelé aujourd'hui pour venir vous récupérer.

Il embrassa à nouveau Dimitri un long moment. Il avait souvent pensé à lui mais revenir à Port Hallen était exclu. Depuis qu'il savait qu'il était un sorcier, sa vie avait complément changé. Finalement se décala pour attraper le gel douche et se savonner.
Il avait marré tout la sensation d'avoir foiré sa mission à un moment donné mais c'était con parce qu'Olivier était bel et bien en vie contrairement aux autres sorciers vidés de leur magie.

Dimitri lui piqua le gel douche pour faire pareil, mais plus rapidement. Il n'aimait pas trop que Bo soit seule avec l'autre.

— Bo vivait avec Eric, précisa-t-il. Je le connaissais bien.

Pas autant qu'il l'avait cru cela dit.

— Même si on était pas au courant de tout ce bordel : DLS, la vie de château, la magie... Mais bref. Voilà. C'est comme ça qu'on a foutu un pied dans ce merdier.

Il regarda Steven encore une fois et plissa légèrement les yeux, comme s'il cherchait à trouver un truc en lui qui lui dise que leurs retrouvailles étaient sincères.

— Tu crois que ton boss savait qu'on se connaissait ?

Dimitri n'était pas sûr que tout cela soit vraiment un hasard. Il n'était pas sûr non plus que le sauvetage providentiel ait vraiment été providentiel justement.

Steven lui adressa un regard qui signifiait qu'il ne croyait pas plus au hasard.

— Prends les fringues que tu veux et sors le premier avec ton air de mâle satisfait... Je vous rejoins après.

Il le tira pour lui murmurer :

— Je laisserai rien vous arriver. Autant que je peux.

Il le lâcha pour se rincer.

— C'est ce qu'arrête pas de répéter Quentin aussi... soupira-t-il en sortant pour s'emballer dans une serviette.

Dimi s'habilla rapidement. S'il remit son jean, il piqua une chemise noire à Steven. Il aurait moins l'air d'un clown qu'avec un tshirt trop grand.
Il rejoignit le salon, un sourire flottant sur les lèvres, et se jeta dans un fauteuil, adressant son regard de mec comblé à sa soeur.

— Il n'en a plus pour long.

— Tu veux dire que maintenant que t'as vidé tous ses placards, il doit ranger ? Et tu lui as jeté du sable dessus alors il se douche aussi... Oh Dimi quel mauvais invité tu fais, se moqua Bo.

Elle lui montra la télé.

— Sur BFM il montre ma vague et la marée en boucle. C'est beau hein ! J'espère que Noé a vu ça aussi... Enfin chai pas s'il a la télé là bas...

Dimitri regarda les images. Ce dont sa soeur était capable défiait son imagination. Il était bien content de ne pas avoir été emporté par la vague et il se demanda où étaient passés Joanna et ce type sorti de nulle part.

— Ils ont dit s'ils ont retrouvé le corps de Jo ?

— Non mais y a des sauvetages en cours à cause des bateaux échoués et de gens coincés par la marée... Elle doit en faire partie.

Steven arriva et s'étonna de retrouver Bo absolument pas décoiffée. Connaissant son chef, c'était troublant.

— On peut sortir manger, si vous voulez.

Dimi s'étira de tout son long et bondit hors de son fauteuil.

— J'ai la dalle !

Ils n'avaient pas déjeuné et s'ils s'étaient brièvement arrêtés sur une aire d'autoroute, ils n'avaient pas grand chose dans le ventre depuis le petit déj.

— Tu restes habillée comme ça ? C'est ton dernier mot ? demanda Olivier à Bo.

Bo montra sa silhouette dans un geste gracieux.

— Je lance un mouvement... Le Selki Underground. Toutes les parisiennes sortiront en bas de jogging et haut de bikini dans les semaines à venir, le prévint elle.

Elle attrapa son frère.

— Toi et moi dans l'ascenseur cette fois.

— Je me fais kidnapper. Désolé, messieurs.

Il adressa un petit signe d'adieu de la main à Steven et ils quittèrent l'appartement pour grimper dans l'ascenseur.
Olivier arrêta Steven alors qu'il fermait la porte de son appartement.

— Nous allons au club Circée. La salle sera sécurisée. On pourra profiter de la soirée.

Steven savait que la direction avait doublé la sécurité là-bas après les meurtres et que les vigiles étaient compétents. Olivier passait plus de temps là-bas depuis quelques semaines, parfois seul, parfois accompagné.

Steven se contenta d'hocher la tête et de verrouiller la porte de son appartement. L'idée d'emmener Bo et Dimitri là bas ne lui plaisait pas du tout. Il n'y avait été qu'une fois pour assurer la sécurité d'Olivier et ce qu'il avait vu... Ce n'était vraiment pas le genre des Hendricks. Mais le pire c'est qu'il savait qu'ils seraient curieux comme des mômes là bas. Si Olivier pensait pouvoir se taper Bo dans cet endroit, Steven avait un sérieux doute.
Une fois dans la cabine, la jeune femme se tourna vers son frère.

— Comme ça... Direct ! Même pas "salut Steven, tu aimes toujours autant le bacon le matin au petit déjeuner?".

— J'aurai le temps de lui poser la question demain matin, fit-il avec un amusement non feint.

Il perdit toutefois son sourire dans la foulée.

— Olivier a rien essayé de te faire ?

— Oh si, dit elle avec un sourire ravi.

Elle poursuivit avec son amusement enfantin :

— Il s'est penché pour remettre une mèche de mes cheveux, il a posé sa main sur ma cuisse... Que des trucs trop mignon... Et j'aurais tellement voulu que Quentin voit ça. A chaque fois je l'imaginais avec sa mâchoire contractée, ses yeux glacial et son ton pour dire "Monsieur de Lyonesse Bis, cette femme est ma propriété, je vous prierai de retirer vos sales pattes de là".

Elle soupira et le regarda :

— Comment t'as trop de chance d'avoir pu t'envoyer en l'air comme ça...

Quentin n'était même pas là, elle ne l'avait pas vu depuis une semaine et Bo continuait à penser de cette manière, c'était désespérant. Il était temps qu'ils repartent.

— Ouais, et j'en avais bien besoin, la provoqua-t-il un peu. Surtout que c'était... Vraiment bien. C'était comme si on s'était jamais quittés, tu vois, mais avec toute l'expérience accumulée entre temps en plus.

Bo éclata de rire alors que les portes se rouvraient.

— Frimeur... En dix minutes, je doute que vous ayez fait étalage de vos expériences... Ou alors elles sont aussi anecdotiques pour lui que pour toi...

Steven attendait en bas.

— Toujours à bavasser sur les histoires de fesse de l'un ou de l'autre, nota-t-il.

— J'espère bien qu'elle m'épargnera ça quand elle pourra ENFIN se taper Quentin, lança-t-il à sa soeur.

Parce qu'il ne doutait pas que ça arriverait très vite. Elle lui avait dit que la protection de Nhill était effective et il voyait bien qu'elle n'attendait que ça, même si elle faisait semblant d'être toujours fâchée contre lui.
Steven aurait préféré qu'il ne balance pas ça devant Olivier. Ce dernier serait ravi de coiffer au poteau Quentin dans la boite où il les emmenait.

Quentin n'eut jamais autant l'impression qu'un vol de 50mn puisse durer aussi longtemps. Il avait surveillé son portable en permanence, essayé d'appeler Jo, de la localiser par magie, mais rien. Il ne voulait pas penser à l'éventualité qu'elle soit morte, surtout après avoir vu les images de cette vague soudaine et gigantesque qui avait déferlé sur les plages de Saint Colomban et de Carnac. En d'autres circonstances, il aurait été ébahi et admiratif des progrès de Bo, il aurait repensé à ce dont ils seraient capables tous les deux, il aurait réfléchi à ce qu'il pouvait accomplir avec la magie élémentaire de la terre à son tour...
Le supplice continua quand il dut rejoindre Paris une fois à Orly. Il fallut une heure au taxi pour l'amener jusqu'à Ahmed. Si Quentin était égal à lui-même extérieurement, gardant son calme pour être le plus efficace possible, son ami pouvait voir qu'il rongeait son frein et que l'inquiétude se disputait à une contrariété de plus en plus grande dans ses yeux.