Chapitre 22 - Baiser ou se faire baiser, il faut choisir (partie 2)

Le Boudoir de Circée n’était qu’à une quinzaine de minutes de l’appartement de Steven.
L'établissement avait une façade assez sobre et élégante. Il y avait un simple café en devanture mais ils le traversèrent jusqu'à la salle à l'arrière. Là, ils descendirent un escalier assez étroit dont les murs blancs ressortaient sous la lumière bleue.

— Il n'y a que les sorciers et leurs amis qui peuvent passer ici. La magie se déguste à toutes les sauces... Dans des salles privées ou non, expliqua Olivier.

En bas des escaliers, une jeune femme semblait en pleine transe, adossée à son compagnon qui faisait courir sur sa peau des éclaires des lumières bleue.

— Il y a un peu de voyeurisme aussi, avoua Olivier.

Une hôtesse habillée en toge grecque assez légère s'approcha d'eux.

— Monsieur de Lyonesse, c'est un plaisir de vous revoir. Nous vous avons préparé votre salon privé et le repas des sensations, lui annonça-t-elle. Ensuite, si vous souhaitez rejoindre la salle principale, il y a un groupe de Electro-magie qui se produira avec des consommations offertes pour nos clients VIP.

Dont visiblement il faisait parti. Le salon était dans un cube de verre, de l'extérieur, il n'y avait que des miroirs mais une fois à l'intérieur, ils virent la salle de concert où certains dansaient déjà, une salle avec une piscine où visiblement on se baignait nu et une autre avec une jungle luxuriante où on pouvait se mettre à l'abri des regards.

— Ça c'est du canapé, dit Bo en se laissant tomber sur l'énorme sofa rouge.

Elle le regarda comme si le tissu allait coller sous ses doigts.

Dimitri était comme à la fête foraine. L'endroit était délicieusement décadent et lui rappelait certaines boites qu'il avait fréquentées à Londres, la magie en plus. Pourtant, il ne se sentait pas aussi à l'aise qu'il l'aurait voulu. Olivier avait précisé que c'était un endroit où on dégustait de la magie. Il espérait bien qu'il n'avait pas l'intention de gouter celle de sa soeur.

— T'es un habitué, on dirait, fit-il au sorcier.
— Bien sûr. C'est la meilleure boîte de la capitale. On y croise parfois quelques stars, mais la clientèle est essentiellement sorcière.

On leur apporta le repas quelques minutes plus tard. Il y avait des choses à picorer mais également des fioles avec écrit "saveur coco-malibu" "compotée des îles".

— Ça ne vous tournera pas la tête. Tout ce que j'ai pris, ne fait pas planer, cela vous permets juste d'avoir la sensation de manger des choses... sans la texture. C'est amusant.

Bo trouvait plutôt que c'était de l'arnaque. Elle préférait avoir un gâteau au chocolat dans la bouche que juste le goût... Elle se leva pour s'approcher de la vitre. Sur la piste de danse, il y avait un mec qui dansait avec des fausses ailes en magie.

— C'est là que tu voles les orgasmes alors, réalisa-t-elle. Ils en avait discuté au restaurant. Tu t'approches des couples et tu leur piques... A moins qu'il n'aille directement jouer dans la jungle.

Quentin détesterait cet endroit totalement impudique.

— Noé devrait venir bosser ici, fit Dimitri en attrapant une fiole de "coco malibu".

Le gamin serait jaloux de voir tout ce qui se faisait ici. Cela lui donnerait peut-être de nouvelles idées.
Il l'ouvrit, la sentit et en avala une petite gorgée, juste pour goûter.

— Entre autres, oui, répondit Olivier à Bo. Je fais ça n'importe où, n'importe quand.

Dimitri se sentit envahit de partout par l'arôme, en bouche, dans le nez et les effets du sucre dans son esprit agirent comme s'il en avait vraiment consommé.
Steven préféra rester sur la nourriture terrestre. Il surveillait avec attention tout ce qui se passait dans la pièce.
Bo revint s'assoir sur le canapé pour manger.

— En faite, comme la majorité des gens sont à poils, ils en ont rien à battre de mon look Selki Underground.

C'était un peu décevant.

Dimi regarda la fiole d'un oeil critique, puis la reposa. C'était surprenant et il n'avait pas la tête qui tournait, mais finalement, il préféra la vraie nourriture. Par sécurité.

— T'es déjà venu ici ? demanda-t-il à Steven.

Olivier sourit en entendant Bo. Il sentait l'impatience le gagner, mais il devait encore patienter un peu. Le moment n'était pas venu.

— Attends d'être sur la piste de danse. Ils ne t'ont pas encore vue.

— Une fois. Pour le boulot.

Bo le regarda en grignotant une brochette de poulet.

— T'es sorcier ou pas ? Demanda-t-elle à Steven.

Il esquissa un sourire.

— C'est une question très personnelle.
— Pfff tu faisais pas ta midinette quand tu parlais branlette à une gamine plus jeune que toi, dit elle en soupirant.

— Tu sais très bien que dire ça, ça va nous pousser à te harceler, fit Dimitri en lui collant son doigt entre les côtes. Alors : sorcier ou objet de pouvoir ?

Il avait son regard de petit curieux obstiné et son sourire malicieux que Steven avait toujours connu. Certaines choses ne changeaient pas.

— Sois pas jaloux, Oli, je m'occupe de toi après, continua-t-il en jetant un oeil à Olivier.

— T'inquiètes, Oli est entrain de trier à vous imaginer vous sauter dessus sur la table basse pour vous piquer vos orgasmes, dit Bo amusée.

Steven soupira en se disant que cette soirée allait foutre en l'air sa vie professionnelle. Il frotta ses deux mains et de l'électricité se mit à crépiter.

— Satisfaits ? Leur demanda-t-il.

— Tu l'as toujours été ? Tu le savais quand on était ensemble ?

C'était tout de même dingue que toute leur vie, ils aient été entourés de sorciers ou de magie sans même le soupçonner. Dimitri allait finir par croire que le Destin avec un grand D existait vraiment, mais surtout, encore une fois, il se sentait largué à être le seul être humain lambda.

— Non. Je ne le suis pas de naissance. Il n'y a qu'un sorcier par génération dans ma famille et un oncle que je ne connaissais pas à débarquer un jour pour me transférer son pouvoir avant de mourir. Ça n'a pas plu à mon père qui m'a foutu dehors... J'ai décidé d'aller trouver de la famille que j'avais en Irlande pour comprendre ce que j'étais devenu...

Il soupira en vidant son verre.

— Parce que je court-circuitais tout et que j'avais même grillé mon chat... J'avais pas envie d'en faire autant avec toi, dit il à Dimitri.

Bo le regarda avec attention.

— Pourquoi tu nous l'as pas dit... On t'aurais pas lâché, Steve, tu sais.

Il haussa les épaules.

— Vous aviez tellement de problèmes... Je voulais pas en rajouter.

Dimi fronça les sourcils. C'était donc pour ça que Steven était parti.

— T'es vraiment con. Après tout ce que t'as fait pour nous...

C'était lui qui avait trouvé comment aider Bo à maîtriser l'arrivée de ses ombres. C'était lui qui avait permis à Dimi de s'assumer vraiment. Ils avaient été longtemps un trio inséparable, soudé... Ils se disaient tout. Enfin, Dimitri l'avait toujours pensé.

— T'aurais juste pu me le dire avant de te casser.

Il lui sourit tout de même. Il ne pouvait pas en vouloir à Steven. Ils étaient encore des gamins, c'était logique qu'il aille voir sa famille.

Steven haussa les épaules.

— On s'était engueulés... Une dispute à la con, sans importance mais sur le coup je me suis dis que tu serais mieux sans moi.

Bo se leva et s'assit sur ses genoux, passant ses bras autour de son cou.

— Oui. Mais moi je méritais pas ça, dit elle. Grâce à toi j'ai pu donner beaucoup de plaisir à Monsieur Watson.

— A qui ? demanda Steven largué.

— Personne d'important, fit Dimitri en écartant le sujet.

Il posa sa main sur l'épaule de Steven, puis fila s'asseoir à côté d'Olivier qui les avait observé en sirotant son verre.

— Bon, et toi ? Quel est le but de voler des orgasmes ? Tu peux pas en avoir autrement ?
— C'est le seul point qui t'intéresse ?

Dimitri eut le sourire d'un chat devant une souris.

— Non, mais celui-là me rend très, très curieux.

Bo se demanda si Quentin avait envoyé d'autres sms à Olivier. Et si celui-ci le snobait pour profiter de la soirée. Elle se leva.

— Je vais aux toilettes. Si je suis pas revenue dans dix minutes, je veux bien qu'on vienne me chercher.

Elle leur sourit et les laissa avant que quelqu'un est la mauvaise idée de l'accompagner. Elle se débrouilla pour trouver l'accueil et passa rapidement  un coup de téléphone. Elle passa bien par les toilettes, avisa un couple qui s'y livraient à des ébats bestiaux et se demanda pourquoi ce lieux inspirait tellement les gens.
Elle revint auprès des garçons qui étaient lancés dans une discussion sur la communauté gay sorcière de Paris.

— Ma féminité est de trop ? demanda-t-elle.

Elle sourit à Olivier.

— Ta féminité ne t'a jamais empêchée de donner ton avis, répondit Dimi. C'est même plutôt le contraire.

Il sourit à Olivier.

— Elle est même de bons conseils et comme on n'a pas le même goût en matière de mecs...

— Tu veux dire que tu ne cours pas après Quentin... Quel dommage, j'aurais pu espérer que tu le détournes de ta soeur, dit Olivier en souriant.

Il termina sa coupe de champagne.

— On pourrait descendre écouter la musique... ou danser, proposa-t-il.

Steven jeta un oeil vers la salle principal. Il commençait à y avoir du monde et il n'aimait pas trop ça. Quand il se leva, il murmura à Dimitri :

— On reste groupé... Si on est séparé, tu prends ta soeur et on se retrouve au café au coin de la rue "Le chat noir".

— T'inquiètes pas, je la quitte plus des yeux.

La nervosité de Steven commençait à le gagner. Il lui avait dit qu'Olivier avait changé, mais en quoi ? En tous cas, il avait suffisamment changé pour que Steven ne soit pas tranquille qu'il les ai amenés ici. Dimitri en venait presque à espérer que Quentin débarque.

Quentin et Ahmed avaient passé l'après-midi à croiser les informations, préférant envoyer des gens vérifier sur place les endroits qu'affectionnait Olivier. Quentin n'arrivait pas à le joindre, tombant systématiquement sur la messagerie. Le sorcier avait tout essayé pour localiser Bo par magie, mais même leur lien ne suffisait pas pour qu'il la retrouve. Peut-être parce qu'il ne savait pas encore comment faire, peut-être parce qu'ils avaient été séparés trop longtemps... C'était frustrant. Elle lui manquait terriblement, mais surtout, l'inquiétude le gagnait à chaque minute. Il avait l'impression d'être un lion en cage, et il avait fallu qu'il se rappelle plus d'une fois que cela ne servirait à rien d'arpenter tout Paris au hasard pour rester chez Ahmed.
Il commençait presque à perdre son calme légendaire quand son ami reçut un coup de téléphone.

— Vous avez reçu cet appel il y a combien de temps ? Cinq minutes.

Au regard d'Ahmed, Quentin comprit qu'il avait enfin une piste.

Quentin avait tout essayé pour localiser Bo par magie, mais même leur lien ne suffisait pas pour qu'il la retrouve. Peut-être parce qu'il ne savait pas encore comment faire, peut-être parce qu'ils avaient été séparés trop longtemps... C'était frustrant. Elle lui manquait terriblement, mais surtout, l'inquiétude le gagnait à chaque minute. Il avait l'impression d'être un lion en cage, et il avait fallu qu'il se rappelle plus d'une fois que cela ne servirait à rien d'arpenter tout Paris au hasard pour rester chez Ahmed.
Il s'approcha de lui sans cacher son impatience.

— Tu as quelque chose ? Où ?

Ahmed raccrocha et lui sourit.

— Une fille a appelé à DLS pour dire que Quentin de Lyonesse avait oublié un objet précieux dans un club bien particulier du VIIIème arrondissement...Rien de plus. J'avais fait vérifier le Boudoir de Circé... Mais il y est peut être allé plus tard et il y a peut être une entrée pour les habitués. A vrai dire, je ne pensais pas sérieusement qu'il oserait.

— Le Boudoir de Circée.

Ahmed vit Quentin se raidir à la mention du club. Il se souvenait très bien de ce qu'en avaient dit Capucine et Jo.

— J'y vais, passe moi tes clés de voiture. S'il l'a touchée...

Le ton était glacial, mais Ahmed sentait le feu qui couvait sous la glace.

Ahmed lui lança ses clés de bagnole et une oreillette.

— T'es mignon, tu la gardes allumée. Je préfère entendre ce qui se passe en même temps que je te suis sur mon écran.

Quentin installa l'oreillette.

— Tu en profiteras pour me guider.

Il ne perdit pas plus de temps pour rejoindre le garage et la voiture.