Chapitre 8 - Paris

— S'il te plait, si elle veut t'offrir quelque chose, laisse la faire, ok ?

Il ne voulait pas que sa mère se vexe ou se retrouve à devoir négocier avec Bo sur ce sujet.

— Il va falloir que j'y aille, fit-il en jetant un oeil à sa montre.

Bo le regarda d'un oeil critique. Il n'avait rien dit sur son teint. Elle était peut être trop pâle pour lui... Enfin elle trainait sur la plage alors elle avait souvent un hâle léger. Ou c'était son grain de beauté sur la pommette. C'est vrai qu'elle ne ressemblait vraiment pas aux deux blondes qui vivait chez lui. Elle haussa les épaules, elle ne pouvait rien y changer de toutes manières.

— Te fais pas tuer, dit elle en tournant les talons avec les toasts pour Gwen.

— Je vais essayer. Passe une bonne journée.

Il finit son pancake, avala rapidement un verre d'eau et salua Annie avant de sortir de la cuisine. Il repassa dans la salle à manger pour prévenir sa mère de son départ, puis rejoignit sa voiture au garage. Il envoya un sms à Jo et Ahmed pour les prévenir qu'il se mettait en route. Il espérait qu'il n'y aurait pas trop de circulation sinon il serait encore en retard.

La découverte de Saint-Germain en Laye ne captiva pas Bo mais elle fit bonne figure auprès de Gwen. La mère d'Eric était gentille et ne semblait pas s'offusquer de ses manières, bien que plus d'une fois elle resta saisie et mal à l'aise devant son langage. A moins que son anglais parfois cru et familier ne soit pas évident à saisir pour cette bretonne qui l'avait appris à l'école et ne le pratiquait que dans la bonne société.
Noé semblait en revanche possédait tout un vocabulaire appris dans les films et les jeux vidéos qui lui permettait de surenchérir les expressions parfois imagées de la jeune femme. Le petit frère d'Eric était d'excellente compagnie mais il avait une vie sociale bien remplie.
Capucine essaya de l'entrainer à son tour dans des dédales de boutiques et d'expositions le second jour qui laissa Bo profondément traumatisée. Elle se promit de ne plus jamais accepter une telle proposition. Elle n'imaginait pas qu'on puisse passer tant de temps dans des boutiques de fringues pour y essayer presque tout et n'en ressortir qu'avec les accessoires les plus scandaleusement chers.
Lorsqu'elle racontait tout ça à Dimitri, le rire chaleureux de son frère lui faisait du bien. Elle savait que cela lui pesait de ne pas être près d'elle mais se contentait de la vanner en lui faisant remarquer qu'elle n'aurait pas à souffrir de tout cela s'il était resté avec elle. Mettre fin à ses engagements à New York n'était pas aussi simple, pas s'il ne voulait pas avoir à rembourser des sommes astronomiques. Il se plaisait à répéter que la prochaine fois, il lirait avec soin les petites lignes à la fin de son contrat le liant à une galerie d'art.
Lorsqu'elle ne sortait pas, Bo errait dans la maison qu'elle trouvait trop grande. Elle évitait la chambre d'Eric avec soin, préférait la cuisine et la terrasse pour dessiner et se cachait parfois dans les combles. Personne ne pensait à venir la chercher au grenier et personne n'avait encore compris que lorsqu'elle disparaissait c'était là haut qu'elle se trouvait.
Quentin n'avait de toutes manières guère le temps de la chercher, rattrapant son absence et se montrant fatigué et assez expéditif quand il rentrait grignoter ou se coucher.
Bo ne s'en sentait que plus seule mais elle ne souhaitait pas l'acculer alors que dans le fond il cherchait vraiment à la protéger. Elle profitait de ce temps pour observer encore et encore, cherchant à se faire une idée sur ces gens qui dans la vie de tous les jours cachaient très bien qu'ils étaient des sorciers. Ils se comportaient juste comme des bourges français et comme c'était les premiers qu'elle rencontrait, cela restait une expérience étrange.
La mer lui manquait de plus en plus. Donner à manger aux carpes koi était un pis aller, peu satisfaisant alors elle la dessinait encore et encore.
Elle s'était achetée toute seule de quoi crayonner dans son coin et avait commencé avec de la pâte à fixe à couvrir les murs de sa chambre pour avoir la sensation de retrouver un peu le paysage qui lui manquait tant. Noé avait eu la gentillesse de lui trouver un poster qu'elle avait pu mettre sur la porte. Certes face à la mer, allongée sur la plage, il y avait une femme nue, les jambes écartées dans une position incongrue mais ça ne dérangeait pas Bo.
Non ce qui la dérangeait c'était la sensation que pour protéger les siens, elle devait se tenir loin de tout ce qui la faisait se sentir vivante et elle-même.