Chapitre 22 - Baiser ou se faire baiser, il faut choisir (partie 4)

Elle lui sourit et sortit son téléphone portable.

Trouvé.

Elle envoya le sms à Ahmed.

— Je te ramène à ma nouvelle boite... Celle dont tu vas te faire virer comme un mal propre.

Elle savait qu'il n'avait pas peur d'elle. Il la prenait pour une idiote et c'était à son avantage.

Olivier se redressa un peu plus, relevant le menton pour la regarder d'un air supérieur que n'aurait pas renié le véritable sorcier.

— On ne joue pas dans la même cour, toi et moi. Quentin aurait du venir me chercher lui-même.

Il l'attrapa par le poignet, serrant fortement, pour la ramener vers lui.

— Vraiment ? Alors pourquoi donc il m'a envoyée...

En réponse, elle lui écrasa sa cigarette contre la main. La braise la consuma et lentement sa peau disparue pour ne plus laisser que du vide. Ainsi c'était vrai, le feu pouvait détruire un changelin. La cigarette bien sûr n'effaça que la moitié de sa main... mais c'était déjà sûrement gênant et flippant pour Olivier.

Olivier devint blanc comme un linge et recula en tremblant. Comme avec la lumière, le feu déclenchait chez lui un sentiment de panique et de terreur pure. Il regardait sa main avec horreur.

— Qu'est-ce que tu m'as fait ? Non !

Il essaya d'envoyer ses ombres réparer les dégâts. Gauthier avait déjà testé de l'entailler pour voir et la plaie avait disparu à peine apparue sans laisser de trace.

— Ça ne marchera pas. D'un autre côté, Oli, je t'ai toujours dis que tu laissais trainer tes mains là où il ne fallait pas.

Elle attrapa son collier dans sa main.

— Je pense que tu as envie de me suivre jusqu'à la voiture, dit elle en plongeant ses yeux dans les siens.

Olivier sentit la suggestion dans son esprit et l'envie de la suivre. Mais une part de lui y résistait. Probablement ses ombres. Peut être aussi que la magie dans le collier n'était pas assez puissante pour un sorcier comme lui... ou que c'était la magie de sa famille.

Elle le vit hésiter, peut-être même mener un combat intérieur.

— Non. Je te suivrais nulle part.

Il ne comprenait pas pourquoi ses ombres refusaient de sortir alors qu'il voulait les lancer contre elle. C'était comme si elles avaient disparu loin en lui. Comme si elles avaient la trouille.

— Sale pute ! Qu'est-ce que tu m'as fait ?

Capucine n'était pas une sorcière. L'ancien Olivier le lui avait balancé à la gueule pour lui faire comprendre qu'elle n'obtiendrait rien de lui à part quelques coups de reins bien placés.
Cela devait venir de ce collier qu'elle manipulait. Du revers de la seule main qui lui restait, il la frappa au visage. Le coup fut si violent qu'elle en perdit l'équilibre. Comme elle avait lâché le collier, il tenta à nouveau de faire appel à ses ombres, mais rien n'avait changé.

Capucine fut déséquilibrée et tomba au sol. Le contenu de son sac à main se répandit par terre. Elle se saisit aussitôt de son briquet. Dans le même temps elle rappela le dernier numéro composé et fit valser son portable loin d'eux.
Elle alluma la flamme et darda un regard sur Olivier.

— De quoi tu es prêt à te passer ? T'es fini si tu approches... On sait ce que tu es et comment te tuer. Tes ombres ne serviront qu'à une chose : aider Bo, cria-t-elle.

Olivier se figea, le regard happé par la flamme du briquet. S'il ne comptait pas la lumière de Bo, il n'y avait que deux choses qui pouvaient le tuer : le feu et que son créateur annule son sortilège. Il s'était habitué à la flamme d'un briquet pour allumer ses clopes. Cela lui avait pris du temps pour ne plus penser que cela pouvait le réduire en cendres au sens propre. D'ordinaire, cela ne lui aurait rien fait, mais là, il était fortement affaibli, blessé...

— Je les lui prendrais une par une, cracha-t-il en essayant de dissimuler la peur qu'il ressentait à l'idée d'approcher à nouveau Bo. Ou j'irai me servir sur Quentin.

Elle essuya le coin de ses lèvres, en sentant un peu de sang perler. Elle avait dû se mordre la joue quand il l'avait frappé.

— Rassure-toi comme tu veux. Mais si tu me suis et que tu nous dis tout, t'as une chance de t'en sortir. Si tu te mets à dos Quentin et Bo, t'es fini.

Elle se releva sans lâcher la pression sur son briquet. Elle avait quand même été bien inspirée de reprendre la clope. Elle espérait surtout qu'Ahmed localisait son appel pour arriver.

— C'est ça. Si je te suis, il n'aura qu'un geste à faire pour m'annuler et il le fera.

Cette idée le paniqua totalement, cela se vit dans ses yeux. Il ne devait pas rester ici. Il devait aller voir Gauthier ou le contacter, lui faire comprendre qu'il ne l'avait pas trahi sinon c'en serait fini de lui.
Il recula de plusieurs pas, vérifiant que Quentin n'arrivait pas dans son dos ou, pire, Bo. Comme la voie était libre, il tourna le dos à Capucine et s'enfuit.

— Fais chier...

Elle ôta sa chaussure à talon et lui jeta dessus. Cette dernière le frappa à la tête avant de finir dans les égouts.

— Nooon ! cria Capucine.

Pas cette chaussure ! Pas cette paire qu'elle avait ramené d'Italie !

Il se retourna.

— Salope ! Tu perds rien pour attendre quand je vais m'occuper de ton cas !

Par réflexe, il envoya ses ombres. Comme il s'était éloigné de Capucine, il les sentit enfin en lui. La jeune femme les vit couler de ses pieds comme des tentacules noires, envahissant l'asphalte. Elles se redressèrent comme des serpents, lui rappelant ce que Noé avait décrit, et elles se jetèrent sur elle pour s'arrêter à la limite de sa zone d'action, retournant aussitôt vers Olivier à une vitesse impressionnante. Il en eut le souffle coupé et chancela.

Capucine ne put s'empêcher de sourire en coin. Sa malédiction commençait à drôlement lui plaire. Mais elle ne voulait pas que Gauthier sache.

— Comme tu le vois, Quentin a trouvé un sortilège en Norvège pour rendre les humains de son entourage intouchable... Je te l'ai dis. T'es foutu. Et on sait aussi que les Velikians ont volé le grimoire. Dis à Joanna qu'on va le récupérer très vite.

Du vrai mélangé dans de fausses informations. Avec un peu de chance, cela remonterait exactement là où elle voulait que ça remonte.

— Je te tuerais.

Olivier n'insista pas plus. Le retour soudain de ses ombres le rendait plus vulnérable et Capucine essayait de le retenir, de le faire parler. Il valait mieux ne pas traîner. Il fit un geste de la main et toutes les poubelles sur le trottoir se jetèrent sur Capucine. Il n'attendait pas de voir le résultat pour s'enfuir et disparaître dans la première rue, cette fois pour de bon.

C'est ainsi qu'Ahmed eut un appel d'une Capucine en larmes parce qu'elle ne retrouvait pas sa deuxième chaussure même en se penchant dans le caniveau et qu'elle était couverte de détritus.
Lorsqu'il la récupéra, elle était assise à un arrêt de taxis, les yeux rougis, les vêtements tâchés et avec une seule chaussure à son pied.

— Tu ne sens pas mauvais, lui fit il remarquer.
— Oh ça va ! répliqua-t-elle.

Dire qu'ila vait pensé lui remonter le moral en disant ça. Il lui releva le menton.

— Tu t'es pris un coup ?
— Mais on s'en fout de ça ! Tu as une idée de ce que c'est que des escarpins Marco Macciono ? Et ce chemisier ? Ce pantalon ? C'est... je sais même pas ce que ça peut être comme tâches ! Comment je vais les enlever ! cria-t-elle.

Ahmed soupira et l'aida à marcher jusqu'à la voiture.

— Je te ramène auprès de Quentin et Noé.
— Je dois prendre une douche et me changer avant...
— Tu rigoles, Capucine...
— Pas du tout ! Et si t'étais prévoyant tu auras pris un rechange, dit elle en bouclant sa ceinture.

Ahmed soupira et prit le chemin de l'appartement. Il sentait que bosser avec elle allait être un problème. Surtout si Jonas et Capucine se retrouvaient à collaborer...