Chapitre 16 bis -

Les jambes de Capucine étaient très fines aussi, sans être en bâton comme la majorité de la jeune génération. Elle était intégralement épilée bien qu'elle eut peu de poils avec sa blondeur. Sa peau était légèrement hâlée depuis quelques semaines puisqu'elle pouvait de nouveau bronzer devant la piscine.
Elle se redressa sur ses coudes et le regarda avec intérêt.

— Vraiment ? Des bijoux enchantés ?

Il lui sourit avec sa malice habituelle.

— Avec des diamants et des pierres précieuses, renchérit-il, ravi de lui faire plaisir. Plus il y a de carats, plus il y a de magie.

Elle se servit de son pied pour lui chatouiller les côtes avec un sourire ravi.

— Il y en a au moins un de cette famille qui sait parler aux femmes, approuva-t-elle.

Noé était sensible à cet endroit et elle le savait.

— C'est normal, les deux premiers sont des brouillons et je suis le chef d'oeuvre, répondit-il en riant.

Il tenta de la chatouiller sous la plante des pieds.

— Ne t'enflammes pas trop, dit elle en dégageant son pied de sa main mais pour reprendre ses chatouilles dans ses côtes.

Noé éclata de rire de plus belle. Il avait toujours été chatouilleux, c'était l'un de ses plus gros points faibles.
Si parfois, il pouvait ressembler à Eric dans ses attitudes ou son sourire, son rire était bien plus clair et spontané.

— Je m'enflammes pas ! C'est vrai !

Il essaya de reprendre son pied et de la chatouiller à son tour derrière les jambes et les genoux.

Elle protesta en riant, cherchant à le repousser de ses pieds. Elle réalisa qu'elle était nue sous son peignoir et s'arrêta aussitôt. Elle se redressa pour s'assoir en essayant d'afficher une attitude digne.

— Je vais m'habiller, dit elle. Je suppose que tu as des fenêtres à réparer du coup.

Noé reprit son souffle et se leva en s'étirant, son tshirt remontant légèrement sur son ventre.

— Et oui... j'imagine que c'est moi qui me tape le sale boulot.

Peut-être qu'Alexis s'en était occupé, mais il en doutait.

— On choisira ton bijou ce soir, ça te tente ?

Elle enfila une culotte discrètement et se tourna vers un placard pour choisir sa tenue du soir. Capucine était la seule à s'habiller exprès pour le dîner.

— Je ne suis vraiment pas certaine que Quentin soit d'accord... Même s'il s'est comporté... étrangement.

— Tout ne lui appartient pas dans cette maison, répondit-il en haussant les épaules. Et si les choses continuent comme ça, tu en auras autant besoin que nous.

Parce qu'il sentait que ce n'était que le début des emmerdes.

— Mais je n'aurai pas cru que tu renoncerais à un bijou, s'amusa-t-il en sortant dans le couloir.

— Il ne s'agit pas de renoncer...

Juste qu'elle n'avait jamais eu de prise sur Quentin et qu'elle avait rarement gain de cause.
Capucine les rejoignit une demi-heure plus tard alors qu'Alexis et Noé réparaient les vitres de la chambre de Gwen. Elle avait choisi une robe assez simple mais qui devait assurément coûter trois zéros derrière le chiffre principal. Elle faisait rarement d'extravagance dans ses tenues mais choisissait toujours des matières nobles.

— T'as loupé ta chance de te faire écarter les cuisses, lui dit Alexis en la voyant.
— Tu avais un langage plus châtié quand tu te prenais pour François 1er, fit elle remarquer en se crispant.

Alexis haussa les épaules.

— Toutes mes bonnes choses ont une fin...

Noé en avait marre de jouer les vitriers, mais ils arrivaient au bout. Quentin s'était chargé des fenêtres du rez-de-chaussée, leur laissant les étages.

— Je me suis toujours demandé... Y a jamais rien eu entre vous deux pour que vous soyez toujours en train de vous bouffer le nez ?

— Non ! répondirent ils en choeur.

Ils se regardèrent en chien de faïence semblant se défier l'un et l'autre d'argumenter quoique ce soit.

— Je n'ai jamais pu la supporter et Eric non plus d toutes manières sauf quand elle ouvrait...
— Si j'étais toi, je ne m'engagerais pas sur cette voie, le coupa froidement Capucine.

— ça, c'est parce que vous êtes des crétins, autant toi qu'Eric, fit Noé à Alexis.

Il sourit à Capucine.

— On descend ?

— Pfff... J'ai jamais compris que tu passes autant de temps à la défendre. C'est comme si Nicolas Hugot décrété que les vipères étaient une espèce protégée, soupira Alexis.

Capucine le regarda de haut comme toujours.

— La vipère EST une espèce protégée...

Elle se tourna vers Noé.

— Descendons oui.

Alexis les suivant en marmonnant que ça l'étonnait pas qu'elle sache une chose pareille.

Cela n'étonnait pas Noé qu'Alexis ne comprenne pas. Alexis ne comprenait jamais rien et rien ne l'intéressait à part lui-même et Eric.

— Au fait, toi et Quentin, vous vous êtes liés, non ? demanda-t-il alors qu'ils arrivaient au rez-de-chaussée.

— Ouais... Quand je dis que je préférais être François 1er...

Capucine soupira.

— Pauvre Quentin... Je comprends mieux son coup de folie avec Joanna, dit elle.

Alexis ricana derrière elle.

— Tu dis ça parce que si le sorcier t'avait possédé toi, il aurait réussi à te dégager. Tu sais que pour débander, il pense à toi ? C'est son exercice pour garder le contrôle quand Bo le chauffe trop...

Noé ne savait pas si c'était vrai et il s'en fichait. C'était dégueulasse comme remarque.

— T'es vraiment qu'un sale connard, fit-il en se postant devant Alexis. Toi qui dis toujours qu'elle te casse les couilles, c'est pas en lui balançant des trucs comme ça qu'elle va avoir envie d'arrêter.

Alexis était un peu plus petit que Noé. Ce dernier serait aussi grand que Quentin et il avait déjà pris sa part en centimètre l'été dernier. Mais c'était qu'un môme et ça se voyait dans les yeux du subsititut.

— Arrête de jouer les héros, Noé... Si t'avais entendu Eric parler des gonzesse, t'aurais passé ton temps à le reprendre.
— Et ça ne lui aurait pas fait de mal, dit Capucine.

Mais visiblement Bo lui avait pas mal cogné dessus à ce sujet et ça compensait un peu.

— Je sais très bien comment Eric parlait des filles et c'est pas la question, répliqua l'adolescent.

Il en avait juste marre que tout le monde s'en prenne à Capucine. Alexis, Quentin, Jo... chacun dans leur genre lui faisait sentir qu'elle n'avait rien à faire dans cette maison. Il n'y avait que lui et sa mère qui l'appréciait pour ce qu'elle était et pas pour l'image qu'elle renvoyait.
Ils se chamaillèrent encore un moment dans le salon. Quentin avait remis les vitres en état et nettoyé un peu, mais la maison aurait besoin tout de même d'un grand coup de ménage. Pour sa part, il était toujours occupé à ranger le bureau de son père quand Gwen rentra. Il avait sauvé les cadres photos et remis la plupart des objets personnels à leur place, mais elle fut tout de même choquée par l'état de la pièce qui contenait tant de souvenirs de l'homme qu'elle avait aimé. Quentin fut bien obligé de lui expliquer qu'ils avaient du faire face à une intrusion et que le pouvoir de Bo s'était déclenché. Cette version n'était pas tout à fait un mensonge, même si elle cachait une bonne part de la vérité, mais comme il l'avait dit à Alexis un peu plus tôt, il valait mieux qu'ils gardent pour eux les motivations du sorcier qui les avait possédés. Il se doutait que Bo en avait parlé à Dimitri, mais il espérait que Gauthier n'avait pas mis des mouchards dans la chambre d'amis.

19h30 sonnèrent finalement aux horloges de la maison et tous se retrouvèrent à la salle à manger pour le dîner, à l'exception des Hendricks.
L'ambiance fut un peu électrique entre Noé, Capucine et Alexis. Quant à Quentin, il mangeait peu, toujours plongé dans ses pensées.

— Il est préférable que nous quittions tous St Germain pour quelques temps, finit-il par annoncer alors que le dessert venait d'arriver.

— Pardon ? s'étrangla Gwen en reposant son verre. Tu n'y penses pas ? Noé est à quelques semaines de passer ses examens.

Capucine leva les yeux, se demandant si elle était inclue ou si elle était censée rentrer chez ses parents.

Quentin se tourna vers sa mère. Il n'avait pas cessé de se demander si Gauthier se servait d'elle pour récolter ses informations. Il aurait voulu s'assurer qu'il ne l'avait pas envoûtée, mais s'il tentait quoi que ce soit, même pour simplement vérifier, l'assassin de son père et de son frère risquait fortement de s'en apercevoir.
Il avait les mêmes doutes concernant Noé et c'est pour cela qu'il avait renoncé à lui parler du journal pour le moment. Clémentine n'était peut-être pas complice de son père, mais rien ne disait le contraire, que ce soit volontaire ou non.

— Je sais, mais notre sécurité est compromise ici pour l'instant. Ce qui s'est passé aujourd'hui a très certainement un lien avec les meurtres des sorciers et celui d'Eric. Nous devons être très prudents.

Il regarda Noé.

— Quitter la maison ne veut pas dire que tu seras en vacances. Il reste à peine un mois avant tes examens et tes concours. De toutes façons, j'espère que cela ne durera que quelques jours, le temps qu'Alexis et moi sécurisions la maison à nouveau.

— Mais... Où est-ce que tu veux qu'on aille ? Et toi et Alexis vous resterez là ? Demanda Gwen perplexe.

— Je pense que Noé et toi, vous devriez vous rendre chez les Lafey.
— Oh, non... pas là-bas. Y a même pas le wi-fi... soupira Noé.
— Peut-être pas, mais il y a de quoi t'amuser à préparer une ou deux potions.

Noé plissa les yeux en regardant son frère, mais Quentin ne semblait ni se moquer, ni lui faire une piqûre de rappel sur l'incident de la semaine passée et son petit trafic.

— En Angleterre, Alexis et moi avons eu affaire à une sorcière, ou un sorcier, pouvant changer d'apparence. Plus les possessions de cet après-midi... Je ne peux pas être partout.

Qu'il l'admette était suffisamment rare pour que les autres le notent.

— Peut-être que vous pourriez trouver quelque chose contre ça. La magie des Lafey n'est pas que folklorique, fit-il à sa mère pour reprendre les mots de Sophie. Elle est au moins aussi ancienne que celle des de Lyonesse et il doit bien y avoir quelques grimoires là-bas pour vous aider, sans compter tes tantes.

Capucine comprit que sa destination était donc chez ses parents. Elle n'était pas étonnée. L'idée de retrouver sa famille lui était plus insupportable. Ils allaient encore lui demander si elle comptait un jour sortir de la faculté ou si elle espérait encore voir sa carrière de mannequin renaitre de ses cendres. Peut être trouverait elle le courage de parler d'une école de communication à moins qu'elle ne se dirige vers le marketing comme lui conseillait une de ses amies. Mais même pour ça, elle était vieille et elle se ferait griller la place par des gamines sortie de l'école et déjà blindées de diplômes et de stages.
Elle grignota un morceau de son pain en se disant qu'elle finirait par créer sa boite mais elle n'en avait aucune motivation. Il n'y avait qu'une chose qui l'intéressait dans la vie : la magie. Et il n'y avait que les de Lyonesse pour vivre de cela.