Chapitre 31 - Welcome to Corsica

Elle répondit doucement à son baiser.

— Oui. Cela fait quelque chose à garder.

Pour les moments les plus difficiles. Elle s'installa dans ses bras, son dos contre son torse et sa tête reposant près de la sienne.
Le soleil commençait à donner au ciel des couleurs rose et orange alors qu'il descendait vers la mer. Elle se sentait bien. Tellement bien qu'elle réalisa qu'elle n'avait pas fumé de la journée sans que cela lui manque le moins du monde.

Il reprit une nouvelle photo d'eux deux, puis commença à grignoter tout en regardant le soleil se coucher. Il était sûr de n'avoir jamais passé de journée aussi merveilleuse de toute sa vie et l'idée que cela se termine déjà, qu'ils doivent se séparer lui serrait un peu l'estomac.

Après avoir grignoté et bu quelques coupes de champagne, Capucine resta un long moment dans ses bras à échanger des baisers et des caresses avec autant de douceur que de sensualité. Elle s'arrêta lorsqu'elle sentit qu'ils risquaient de basculer sur autre chose et se leva avec un sourire pour retourner prendre le contrôle du bateau afin de le ramener vers l'île de Cavallo.
Elle se sentait tellement bien avec lui qu'elle se demandait pourquoi deux semaines plus tôt elle n'avait pas pensé à lui sous cet angle. Qu'est-ce qui avait pu faire basculer les choses ainsi ? Un simple jeu de leur part ? C'était si étrange de voir ce que la vie lui réservait.

Noé s'était d'abord installé sur la banquette pour l'admirer, mais n'avait pas pu résister longtemps à venir se coller contre son dos, les mains sur son ventre. Il ignorait quand ils se reverraient exactement, alors il voulait profiter de son contact jusqu'au bout.
Alors que Cavallo approchait, il resserra légèrement son étreinte et l'embrassa doucement dans le cou. Il ne fit rien d'autre même si l'envie n'était jamais loin. Bientôt, ils seraient loin l'un de l'autre et il réalisa qu'il n'avait toujours pas parlé de ce qui était arrivé au Prêtre Rouge, mais l'idée que cela gâche tout le bonheur de cette journée le fit encore reculer.

Elle coupa le moteur et tourna son visage pour l'embrasser. Elle caressa sa nuque et écarta doucement ses lèvres.

— J'ai tellement envie de passer la nuit avec toi, murmura-t-elle.

Mais elle imaginait sans peine Quentin faisant les cent pas. Elle avait éteint son téléphone ce qui insupportait autant que Noé lorsqu'elle faisait ça.

— Moi aussi...

Il caressa son nez du sien doucement.

— J'ai aucune envie d'être raisonnable et de repartir.

Mais sa mère devait s'inquiéter malgré tout et plus il resterait, plus cela serait suspect, il le sentait.

Elle l'embrassa doucement encore et s'efforça de quitter ses bras pour amarrer le bateau. Elle revint contre lui et posa ses deux mains sur sa nuque pour venir l'embrasser avec plus de fougue.

— Essaie de revenir demain soir, murmura-t-elle après s'être légèrement écartée de lui.

Noé lui sourit avec chaleur.

— Cette fois, j'essayerai de ne pas atterrir dans la chambre de ta mère, s'amusa-t-il, encore gêné d'avoir confondu Anaïs avec sa fille.

Elle sourit et noua ses bras autour de son cou.

— Ce serait très gênant que ce soit elle qui tombe amoureuse de toi.

Même si ça lui ferait sûrement du bien.

Cela lui rappela soudain son cauchemar de cette nuit et il en perdit son sourire un court instant. Il ne fallait vraiment pas qu'il pense à cela : Capucine était bien vivante et elle était dans ses bras.

— Je sais que je suis irrésistible, mais là, je saurai plus où me mettre.

Elle lui donna un dernier un baiser avant de le relâcher.
Ils quittèrent le port pour remonter jusqu'à la maison. Ils discutèrent un moment avec Mamé dans le salon, racontant un peu leur journée. Elle demanda à Noé qu'il lui fasse une démonstration de sa porte une autre fois. Elle avait bien compris que se quitter ne serait pas simple pour tous les deux et ne souhaitait pas gêner en y assistant.
Si Capucine conserva son sourire, elle ne pouvait nier que le voir tracer une autre porte, cette fois au-dessus de celle de sa chambre à elle, lui faisait un peu mal au ventre. Elle s'assit sur son lit, ôtant ses chaussures pour se masser les pieds sans le quitter des yeux.

Si Noé partageait ses sentiments, une fois qu'il se mit à tracer son sortilège, il y reporta toute son attention. Il avait fait les calculs de retour en amont et suivait ce qu'il avait noté sur son smartphone.

— J'ai trouvé à quoi servait exactement le bâton-craie, expliqua-t-il en vérifiant que tout était bien en place. ça m'éviterait d'avoir à tout refaire à chaque fois, c'est tout. ça veut dire que même sans, je devrais pouvoir nous emmener à l'autre bout du monde tant que j'ai des coordonnées.

Mais il réfléchissait déjà à améliorer tout le processus pour rendre la création des portes plus faciles. Faire des calculs lui plaisait, mais l'attaque de la Dame d'Ombre l'autre nuit lui avait fait prendre conscience qu'en cas d'urgence, cela pouvait être utile de ne pas avoir à en faire. Il avait toutefois conscience qu'adapter le sortilège pouvait lui prendre des mois, voire des années. Peut-être qu'il existait un ouvrage pouvant l'y aider aux Archives Invisibles ?

— Voilà. C'est prêt.

Il soupira en regardant sa porte. Il ne lui restait plus qu'à l'activer.

Elle resta assise à le regarder.

— Je n'ai pas à te dire d'être prudent sur la route...

Il se rapprocha et resta debout devant elle, posant ses mains sur ses épaules. Elles remontèrent le long de son cou jusqu'à son visage. Il ne souriait plus, ne cachant nullement combien cela lui coûtait de repartir.

— Au pire, j'atterrirais dans la piscine.

Il soupira et se pencha pour l'embrasser doucement.

— Capucine, je...

Depuis ce matin, il s'était dit qu'il lui parlerait du Prêtre Rouge avant de partir, qu'il fallait qu'il le fasse, qu'il ne voulait pas le lui cacher...

— Sois tu vas dire un truc qui me poussera à te faire rester. Sois ça sera quelque chose qui me donnera envie que tu partes. Là comme l'autre me rendront les choses difficiles, murmura-t-elle en plongeant ses yeux dans les siens.

Noé esquissa un sourire.

— Tu vas me manquer.

Si c'était vrai, cela lui donnait encore une fois l'impression d'être un gamin incapable d'assumer ses conneries.

— Ta grand-mère t'attend pour que tu lui dises combien je suis merveilleux, fit-il après l'avoir embrassée.

Il la relâcha à regrets. Il fallait qu'il parte. Vraiment.

- Et toi, tu ne pourras le dire à personne...

Elle lui sourit et lui fit signe de partir.

- Il faut que j'aille prendre une douche.

Il recula jusqu'à la porte en secouant légèrement la tête d'un air navré.

— Ne me tentes pas de rester la prendre avec toi...

Mais il plaça sa main sur la porte et activa le sortilège. Les runes se mirent à briller sous l'action de sa magie. Comme à l'aller, il sentit qu'il en avait dépensé un peu plus que lorsque sa porte leur avait permis d'aller de Paris à St Germain.
Il lui sourit une dernière fois et ouvrit la porte.

— A bientôt, ma Capucine.

Il resta encore une poignée de secondes, puis se fit violence pour disparaître au travers du portail. La porte se referma et la magie disparut, laissant Capucine seule dans sa chambre.