Chapitre 31 - Welcome to Corsica

— Je te les rembourserai, fit il en hochant la tête.

Il n'avait pas pris son portefeuille en partant cette nuit, n'ayant pas pensé rester au delà du petit déjeuner. Au restaurant, il lui avait déjà dit que ce serait à charge de revanche.

Capucine alla régler les livres et en ajouta deux autres.
Elle lui tendit le sac et reprit sa main dans la sienne.

— Je t'ai ajouté un bouquin sur la navigation et un autre pour que tu poursuives dans ta voie...

Lorsqu'il jeta un oeil, il découvrit un livre sur fond de taoïsme et de trantrisme sexuel.

— Tu veux que je joigne l'utile à l'agréable, fit-il avec amusement.

Il passa son bras autour de ses épaules et l'embrassa sur la tempe.

— Je compte bien mettre leurs conseils en pratique rapidement.

— Rapidement, ce n'est jamais la voie la lus intéressante, murmura-t-elle avec un sourire entendu.

Elle posa un instant sa tête sur son épaule.

— On va regarder le soleil se coucher sur le bateau ? Je connais des îles dans le coin qui sont vraiment belles.

Ensuite, il faudrait bien qu'il rentre.

— Je vais prévenir qu'ils ne m'attendent pas pour dîner, approuva-t-il en la gardant contre lui.

Il se demandait s'il aurait l'occasion de revenir dans les jours qui allaient suivre.

— Quentin va te pourrir la vie, murmura-t-elle.

Surtout s'il avait appris des choses auprès de l'Huldre. Ou au contraire s'il n'en avait pas appris autant qu'il l'espérait.
Elle le regarda.

— J'essaierai de te rejoindre là bas, rapidement.

— Tu sais bien qu'il me pourrira même si je rentre manger avec eux, alors autant en profiter un peu plus.

Noé était réellement curieux de ce que son frère avait pu apprendre aujourd'hui, de ce que cette rencontre avait eu comme répercussion sur lui, mais il savait bien qu'il serait la dernière personne à qui Quentin en parlerait.

— On sera moins libre là-bas. La maison est plus petite, on est tous les uns sur les autres... fit-il avec un regret manifeste.

Et il y aurait Miu. La démone ne lui avait guère manqué aujourd'hui, peut-être parce que toute son attention était focalisée sur Capucine, peut-être aussi à cause de sa malédiction, mais une fois au pays Basque, il savait que les choses seraient différentes.

— Alors peut être que je devrais rester ici et que tu pourrais me rejoindre la nuit ou lorsque Quentin s'absente...

Elle le relâcha pour marcher devant lui à reculons sans le quitter des yeux.

— Il me semble que tu avais crée un sortilège donnant l'illusion que tu dormais dans ton lit lorsque tu avais fais le mur il y a quelques mois...

Il rit doucement, une lueur fière dans le regard.

— Oh, tu t'en souviens de celui-là ? Je m'en suis servi avec Chris il y a quoi ? Déjà deux mois, pour filer en douce de chez ses parents.

Mais est-ce que cela fonctionnerait avec Quentin ? C'était tentant de réessayer.

— S'il n'y a pas d'attaques surprise ou qu'il ne veut pas te réveiller, il n'en verra peut être rien... Sauf qu'il voit les tissages...

Elle réfléchit et il dût la retenir pour qu'elle ne rentre pas dans un poteau.

— Fais gaffe où tu vas, lui fit-il remarquer en souriant, la prenant par la taille.

Il en profita pour lui voler un baiser.

— Ma chance, c'est qu'il est très, très occupé avec Bo.

Cela le laissait encore perplexe de la part de son Terminator de frère. Il l'avait tellement vu imperméable à tout ou presque qu'il avait du mal à s'habituer à ce contraste soudain. D'un autre côté, il ne souhaitait pas que les choses redeviennent comme avant, pas après tout ce qu'il avait lu dans le journal d'Eric.

— Ce n'est pas faux. Et vice-versa tu es très très occupé avec moi... Il semblerait que quelqu'un veuille mettre à mal les hommes de cette famille en utilisant des femmes, dit elle en riant.

Elle ajouta avec un sourire :

— C'est peut être un plan de Sophie...

— Mais voilà ! C'est comme ça que tu entreras au conseil d'administration de DLS. Pas en épousant Dark Olivier ! Pourquoi j'y ai pas pensé plus tôt !

Il sortit son téléphone.

— Il faut que je prévienne mon frère tout de suite de ce plan machiavélique.

Elle le regarda faire avec un sourire amusé.

— Non ça c'est uniquement parce que je suis plus intelligente que toi et Quentin réunit.

Il lui rendit son sourire.

— Bah, je suis un p'tit génie, mais tu as dix ans d'avance. Faut que je bosse pour rattraper mon retard et être à ta hauteur. Mais pour Quentin, c'est foutu, c'est sûr.

Elle s'approcha et noua ses bras autour de son cou pour se serrer contre lui.

— Je ne doute pas un instant que tu me dépasseras haut la main dans quelques années. Essaie juste de garder ton coeur intact...

Il posa aussitôt ses mains sur sa taille.

— On sait que je suis le meilleur, je compte bien le rester.

Il frôla ses lèvres des siennes.

— Je compte sur toi pour m'empêcher de devenir trop con de toute façon.

Elle lui sourit.

— Je crois que j'ai admirablement réussi jusqu'à présent.

Elle l'embrassa avant de le relâcher pour se diriger vers le port. Ils montèrent sur le bateau et repartir en mer. Une fois au large, elle lui laissa la barre et s'installa à côté de lui, la tête sur son épaule.

Noé apprécia une fois encore d'être à la barre et il avait hâte de mettre le nez dans le bouquin qu'elle lui avait offert. L'idée de louer un bateau pour quelques jours et d'apprendre à naviguer avec elle lui semblait merveilleuse, et pas seulement parce qu'ils seraient seuls sur l'eau comme aujourd'hui.
Le jeune homme avait bien conscience que leurs différences pouvaient être un obstacle sur le long terme. Dix ans d'écart, surtout à son âge, pouvait se révéler un gouffre difficilement franchissable : ils n'avaient pas les mêmes loisirs, pas les mêmes amis, sûrement pas les mêmes goûts musicaux, ils ne sortaient pas aux mêmes endroits et il doutait emmener un jour Capucine à une soirée avec ses potes. Sans compter leur expérience du monde qui, pour lui, tenait en si peu de choses encore. Mais Noé avait tant à découvrir avec elle qu'il espérait que cela gommerait ces différences, qu'en se forgeant de jolis souvenirs comme ceux de cette journée ils se trouveraient suffisamment de points communs pour que cela marche. Leur passion pour la magie, son étude et son expérimentation était déjà une bonne base. Peut-être que la navigation, les voyages pouvaient s'y ajouter. Et puis, cela faisait partie de cette Capucine qui se dévoilait petit à petit à lui, de celle qu'il ne faisait qu'effleurer pour l'instant. Il avait toujours aimé la femme qu'il connaissait au quotidien, il n'avait aucun doute sur le fait d'aimer encore plus celle qu'elle cachait.

Elle arrêta le bateau près d'une série de petites îles.

— On devrait avoir une jolie vue ici sur le coucher de soleil. On ne tardera pas ensuite, je n'aime pas naviguer de nuit.

Avoir ramené le bateau du prêtre lui avait suffit. Elle ouvrit le petit frigo.

— Ce sera Champagne et charcuterie, dit elle amusée.

— Pas mal pour finir la journée.

Il récupéra un plaid pour aller l'étaler à l'avant du bateau.
Alors qu'elle le rejoignait, il la prit en photo. Ils en avaient déjà pris quelques-unes à Bonifacio. C'était leur première vraie journée ensemble, il voulait en conserver des souvenirs.

Elle lui tendit la bouteille pour qu'il l'ouvre et posa l'assiette ou elle avait réussi à réunir charcuterie, un peu de fromage de brebis et des biscuits apéritifs. Elle s'assit à côté de lui et le regarda avec un sourire.

— On part à Bali dans quelques semaines et on loue un voilier là bas pour se faire les îles Thaïlandaises.

— Oh oui. ça me plait, ça, comme idée.

Il fit sauter le bouchon et le champagne s'échappa un peu de la bouteille. Il en but directement au goulot pour que ça ne se perde pas et lui tendit la bouteille à son tour.

— A nous et à nos futures vacances.

— Tsss gamin, dit elle en attrapant les flûtes qu'elle avait ramené pour les remplir.

Elle posa la bouteille et prit son verre pour l'approcher du sien.

— A ta liberté à venir et ce que tu en feras, dit elle.

Cela valait autant pour ses dix huit ans que pour Miu.

Il fit tinter sa flûte contre la sienne, la regardant dans les yeux. Il but une gorgée et se pencha pour embrasser Capucine.

— C'était vraiment une très belle journée.

Même s'il se faisait engueuler en rentrant, cela aurait largement valu le coup.